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 Quand l'Eglise prend conscience des limites de la "réduction de Dieu" au "mamour " en peluche consolateur de ses voeux

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Quand l'Eglise prend conscience des limites de la "réduction de Dieu" au "mamour " en peluche consolateur de ses voeux Empty
MessageSujet: Quand l'Eglise prend conscience des limites de la "réduction de Dieu" au "mamour " en peluche consolateur de ses voeux   Quand l'Eglise prend conscience des limites de la "réduction de Dieu" au "mamour " en peluche consolateur de ses voeux Icon_minitimeDim 31 Jan - 16:22

Dieu a-t-il abandonné Haïti ?


La tragédie qui a frappé Port-au-Prince a fait resurgir des « pourquoi » sur le mystère du silence de Dieu et des origines du mal. Des Haïtiens, d’ici ou de là-bas, confient à « La Croix » ces interrogations universelles


Une femme en prière au cours d'un service religieux à Port-au-Prince, dimanche 24 janvier (AP/Abd).

«Comment croire en un Dieu infiniment puissant et bon qui observe, goguenard, ses “enfants” crever sous les débris des immeubles de Port-au-Prince ? Si on est créateur de l’univers, on est en mesure d’empêcher de telles catastrophes ! Et si, le pouvant, on ne le fait pas, on ne peut se proclamer Dieu d’amour. Tout le reste est littérature. »

Tel Voltaire en son siècle après le séisme de Lisbonne, l’auteur de ces lignes est l’un des nombreux internautes à avoir exprimé sur un blog de La Croix sa colère et son incompréhension. Comment comprendre ce nouveau malheur venu s’ajouter aux 32 coups d’État et aux centaines de cyclones qui sont passés sur l’île depuis deux cents ans… Le séisme du 12 janvier a fait resurgir de manière abrupte des « pourquoi » qui touchent au scandale de la souffrance des innocents, à l’énigme insoutenable du mal, au mystère du silence de Dieu.

« Notre foi est mise à rude épreuve par ce désastre horrible », reconnaissait, quelques jours après le drame, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, dans son homélie lue en hommage aux victimes. « Toute personne qui croit en Dieu et qui essaye de vivre de cette foi ne peut pas ne pas être touchée au cœur par le malheur qui détruit et par la malédiction qui touche votre pays. Tous s’interrogent : “Où es-tu Seigneur ? Que fais-tu Seigneur ?” »

Chacun, au milieu du chaos, interroge le ciel
« Comment Dieu peut-il laisser faire cela ? » reprend une jeune catholique haïtienne, Stéphane Rebu, 25 ans, rencontrée dans un camp de sinistrés à Port-au-Prince. Lorsque la terre a tremblé, cette enseignante d’éducation physique était dans la cour avec ses élèves. « Mon école est au bord d’une falaise, et le mur de l’enceinte est tombé au pied de cette falaise… C’était effrayant ! Je suis rentrée chez moi en marchant, et à chaque coin de rue, j’entendais des gens prier. Je me demande encore comment j’en suis sortie vivante ! »

Domini, étudiant de 22 ans, a perdu sa sœur. « Nous avons beaucoup prié pour qu’on la retrouve vivante. Mais son corps a été dégagé des décombres… C’est terrible pour toute la famille, mais nous devons l’accepter. On se demande pourquoi c’est arrivé, pourquoi nous… »

Comme Stéphane ou Domini, chacun, au milieu du chaos, interroge le ciel, tente de comprendre l’inexplicable. Certains y voient une punition divine. « Je ne sais pas contre quoi, ni contre qui, ni ce que cela veut dire précisément. Mais la preuve, c’est que dans la même rue, certaines maisons sont tombées, alors que celles d’à côté ont tenu le coup, sans explication », affirme Francisco, 16 ans.

«Des innocents sont morts, mais ce ne peut être la volonté de Dieu»
Clainise, 23 ans, a perdu son oncle et sa cousine : « Je ne veux pas dire que les personnes qui sont mortes ont été visées par Dieu, modère-t-elle. Mais c’est un châtiment contre le pays tout entier, contre les hommes qui sont trop égoïstes. »

« Je suis catholique et je pense que ce tremblement de terre n’a rien à voir avec Dieu, rétorque Jean-Pierre Johnson, 22 ans, photographe, qui a pu s’échapper de son studio dès les premières secousses. C’est un phénomène naturel. Les victimes sont mortes à cause des mauvaises infrastructures de notre pays. » Pourtant, lorsqu’on lui parle des rescapés, Jean-Pierre avance : « Je crois quand même que certaines personnes ont reçu une faveur, notamment celles qui sont sorties indemnes des décombres. C’est tellement incroyable. Dieu doit se dire qu’il a un plan pour elles, ou bien qu’elles ne méritent pas de mourir. Dieu fait des choix. »

Berthony, journaliste et peintre de 40 ans, mormon, a lui aussi l’impression d’être un miraculé : « Ma maison s’est effondrée. À ce moment-là, j’assistais aux funérailles de mon beau-frère et ma sœur, enceinte, était chez sa mère. Sans cet enterrement, je pense que nous serions tous restés à la maison et nous aurions été ensevelis. Je pense que Dieu est bon. Des innocents sont morts, mais ce ne peut être par sa volonté. »

«Pas l’ombre d’une révolte, mais une foi profonde»
« Parfois, j’interroge Dieu : pourquoi lui ? Il était un père pour nous, confie, à Paris, Gemelite Lazare, 53 ans, cousine de Mgr Joseph Serge Miot, archevêque de Port-au-Prince, tué lors du séisme. Mais je sais que Dieu ne l’a pas voulu. Je dis : que votre volonté soit faite. »

Une de ses amies, Marie-Rose Pascal, 42 ans, témoigne de la même confiance en la Providence : « Il ne nous a pas lâchés. Il nous aime tellement. Hier, ils ont trouvé des vivants sous les décombres, après huit jours sans boire ni manger. C’est le signe que Dieu est là, c’est lui qui les soutient. Les gens posent la question à l’envers : ils ne voient pas que tout cela, ce sont des miracles. »

« Pas l’ombre d’une révolte, mais une foi profonde : on retrouve là, à mon sens, l’âme haïtienne. Pour un Haïtien, Papa Bon Dye est foncièrement bon », observe le P. Bernard Collignon, prêtre des Frères des Écoles chrétiennes, en Haïti depuis des années.

«Dieu ne veut pas la souffrance. Il est là avec nous»
« Mis à part quelques prophètes de malheur qui profitent de la situation pour accuser le peuple haïtien de tous les péchés du monde, la propension générale est plutôt à la bénédiction et à la louange pour les vies sauvées, confirme le P. Maurice Piquard, montfortain, dont la congrégation a perdu dix séminaristes. Dieu est loué comme le maître de la vie. Le présent et l’avenir lui appartiennent. Les Haïtiens savent d’instinct que Dieu est Amour infini, qu’il accueille les défunts avec lesquels ils continueront à vivre une relation très forte. »

Mais si les Haïtiens se refusent à intenter un procès à Dieu, que dire alors de l’énigme violente du mal, broyant aveuglément la vie de plus de 150 000 personnes ? « Nous aimerions savoir pourquoi ce mal se produit, mais une tragédie de cette envergure est au-delà de toute explication : ce serait justifier le mal que de l’expliquer, souligne Mgr Pierre Dumas, évêque de l’Anse-à-Veau et de Miragoâne. Dieu se trouve sous les tentes, avec ces gens qui ont tout perdu, plaide-t-il. Aujourd’hui, le visage de Dieu, c’est le visage souffrant du Christ dans les traits des personnes sinistrées, qui, la nuit, ont faim et froid. Dieu ne veut pas la souffrance de ses enfants, il l’a portée dans son propre corps, il l’a traversée. Il est là avec nous. »

«C’est dans l’action au service des autres que notre intelligence reçoit la réponse»
Pour le président de Caritas Haïti, qui sillonne sans cesse les camps de sinistrés pour consoler les familles endeuillées et organiser les secours, la réponse n’est pas dans la spéculation, mais dans la manière dont chacun répond à la tragédie : « La qualité humaine qu’on va mettre, la charité qui va découler de nos cœurs, cette capacité de développer une plus grande solidarité, détaille Mgr Dumas, c’est tout cela qui va faire la différence et permettre aux gens de pouvoir se relever. »

« C’est dans l’action au service des autres que notre intelligence reçoit la réponse aux questions posées, renchérit le P. Manuel Rivero, vicaire provincial des dominicains, qui organise le ravitaillement dans la capitale haïtienne. Encore ces jours-ci à Port-au-Prince, j’ai pu expérimenter l’innovation qui jaillit dans le combat commun contre le malheur. Il arrivait que des jeunes ou de moins jeunes me saluent, autrefois, dans la rue ou dans un bidonville : “Bonsoir, Blanc.” Mais personne ne m’a appelé “Blanc” ces jours-ci quand, avec des Haïtiens, je portais un cadavre dans une rue jonchée de morts. À l’occasion du malheur, les cœurs peuvent s’ouvrir. Le meilleur de l’homme émerge alors des profondeurs de l’être avec des richesses jadis laissées en friche. »
Gilles BIASSETTE (à Port-au-Prince) et Céline HOYEAU
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MessageSujet: Mais "vole" aussitôt à son secours pour sauver son fond de commerce et se forger une nouvelle idole pour ne plus avoir à s'interroger   Quand l'Eglise prend conscience des limites de la "réduction de Dieu" au "mamour " en peluche consolateur de ses voeux Icon_minitimeDim 31 Jan - 16:24

«Il faut absolument écarter toute idée de châtiment»


Pour le jésuite François Euvé, auteur de « Crainte et tremblement » (1), toute catastrophe, telle celle endurée par le peuple haïtien, n’a rien d’une punition du ciel mais est, au contraire, une invitation à la solidarité humaine

ENTRETIEN
P. François Euvé, jésuite
Doyen de la faculté de théologie du Centre Sèvres

La Croix : Nombre d’intellectuels haïtiens demandent depuis le tremblement de terre que l’on cesse d’utiliser le terme “malédiction” à propos de leur pays. Partagez-vous ce sentiment ?
P. François Euvé : Depuis la nuit des temps, c’est un réflexe tout à fait humain de penser que derrière une calamité se cache une forme de destin, de déterminisme cosmique qui frappe telle personne, tel groupe humain, tel pays. Penser en termes de fatalité naturelle est en un certain sens rassurant, déculpabilisant.

À l’opposé, d’autres voient dans toute catastrophe une forme de châtiment : les victimes, ou leurs proches ou leurs ancêtres, sont touchées par le malheur parce qu’elles sont fautives. Or, le message chrétien se démarque de ces interprétations. Il nous invite à lutter contre ces malheurs dans la mesure de nos moyens.

L’homme peut-il vraiment agir contre de tels cataclysmes ?
Malheureusement, on ne peut pas tout contre tout. Cela dit, l’homme est en mesure d’essayer de développer des techniques qui permettent de prévoir ces cataclysmes à l’avance, d’éviter de trop construire sur des zones réputées sensibles… La Bible nous invite à ne pas nous contenter d’un état de fait contre lequel on ne pourrait rien, elle nous pousse à aller au-delà.

Il serait donc faux d’associer à ces drames une colère divine contre les hommes pécheurs…
L’Évangile nous en défend. Il suffit de relire l’épisode de l’effondrement de la tour de Siloé, au chapitre 13 de l’Évangile de Luc. Jésus repousse clairement l’idée que les victimes seraient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem. C’est l’exemple même du malheur qui survient indépendamment de la culpabilité des personnes.

Même si l’humanité est tentée de voir assez spontanément l’expression d’un châtiment divin dans les catastrophes naturelles, encore une fois, le message évangélique nous fait sortir de cet état d’esprit. Ce qui ne veut pas dire que les victimes étaient forcément innocentes. Mais elles n’étaient pas plus coupables que les autres.

Comment la foi peut-elle justifier cela ?
La foi chrétienne ne donne aucune justification ! C’est un malheur qui survient. La seule réponse chrétienne qui soit à la hauteur du message évangélique est d’essayer de remédier à ses conséquences. Il faut absolument éviter les justifications, qui sont autant de moyens de se défausser…

Il faut se demander, par rapport aux réactions qu’on éprouve, ce qu’elles permettent. Nous poussent-elles à être plus solidaires, ou nous placent-elles devant une fatalité contre laquelle nous ne pouvons rien ? Si nos réactions vont dans le sens d’une impuissance, ce n’est pas la bonne voie. Vouloir justifier un tel malheur dans un plan divin quelconque me paraît une fausse piste.

Mais où est Dieu alors ? Pourquoi semble-t-il si absent ?
Dieu agit à travers ceux qui soulagent les souffrances des autres, dans la solidarité de ceux qui se mobilisent avec leurs moyens, quels qu’ils soient : soutien amical, matériel, spirituel… Dieu ne se manifeste pas indépendamment des médiations humaines.

L’image d’un Dieu qui agirait isolément de l’humanité ne me paraît pas conforme au Dieu tel qu’il se révèle dans la Bible, et dans l’Évangile en particulier. Jésus n’a pas guéri tout le monde, mais il a transmis son pouvoir de guérison à ceux qui ont cru en la vie qu’il apportait.

L’enjeu n’est pas de se demander ce que Dieu fait pour ceux qui souffrent, mais ce que nous, nous faisons. Il faut absolument écarter toute idée de fatalité, de malédiction, de culpabilité, de châtiment.

Recueilli par François-Xavier MAIGRE

(1) Crainte et tremblement. Une histoire du péché, Seuil, 390 p., 22 €.
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